Une image ne sert-elle qu'à illustrer ?
Sociétés & Représentations, n° 50, 2020/2
L'explosion iconographique contemporaine est désormais établie. Alors que l'histoire de l'art ne cherche plus à résister à l'essor des visual studies, et que les études iconographiques ont été investies par toutes les disciplines des sciences humaines et sociales, quels usages fait-on des images ? Ce renchérissement de l'intérêt pour les images et leur histoire s'est-il accompagné d'une évolution significative dans les médiations essentielles que sont les pratiques éditoriales, tous supports confondus ? La polémique suscitée en 2018 par la parution du livre Sexe, race et colonies, fut éclairante quant à la portée heuristique, l'usage documentaire et la fonction éditoriale des images comme sources historiques. Au-delà d'un rapport "illustratif" à l'iconographie, les usages éditoriaux des images permettent-ils d'analyser intrinsèquement leurs conditions de production, de diffusion et de réception ? Leur format de reproduction lui-même et les légendes descriptives qui les accompagnent permettent-ils de les regarder et les comprendre dans leur polysémie ? Force est de constater qu'au-delà des louables intentions de décryptage la fonction décorative des images n'a guère changé et qu'elle a peut-être même tendance à empirer.